Le laser est aussi utilisé pour faire des expériences avec des faisceaux plus exotiques.
C’est ainsi que grâce à une collaboration avec le CELIA de Bordeaux (Ph. Balcou) et l’université de Floride (M. Richardson) nous avons pu réaliser nos premières expériences avec des faisceaux dit « vortex ».
Vous avez dit vortex ?
Nous ne sommes pas ici dans un épisode de Stargate et il ne vous fera pas voyager de mondes en mondes. On parle de vortex lumineux… Traditionnellement la lumière utilisée en expérience laser dispose de fronts d’onde plans, perpendiculaires à la direction de propagation du faisceau laser, elle peut, en plus, porter une polarisation linéaire, elliptique ou circulaire. Dans ce dernier cas la polarisation effectue une révolution autour de l’axe de propagation pendant que le faisceau se propage, dessinant une spirale : on dit alors que la lumière porte un moment angulaire de spin. (Fig. 1. Gauche)
Dans le cas d’un faisceau vortex, ce n’est plus la polarisation qui dessine une spirale autour de l’axe de propagation mais le front d’onde lumineux, on parle alors de moment angulaire orbital. Dans notre cas ce faisceau porte une polarisation linéaire (Fig. 1. Droite)
L’origine du mondment :
Sur la majorité des installations laser les faisceaux sont super-gaussiens ou gaussiens. Il existe diverses techniques pour créer un vortex depuis ces derniers.
L’une des plus simples, utilisée ici, est la mise en place dans la ligne laser d’une lame de phase (en verre) telle que montrée dans la figure 2. Cette lame en escalier permet de créer une différence de phase par traversée d’épaisseurs différentes de matériau le long de l’axe azimutal, dans notre cas le déphasage induit le long de cet axe est de 2π, on parle de moment angulaire orbital d’ordre l=1.
Cet ajout de phase crée mécaniquement une singularité au centre du faisceau. En effet au point central le faisceau ne peut pas prendre toutes les valeurs de phase imposée par chacun des segments de la lame. Cela résultat en un point au centre, dit singularité, où il n’y pas d’intensité lumineuse. (Fig 3.)
Figure 3. Faisceau gaussien incident sur la lame (Gauche) et faisceau obtenu après la lame et 2 mètre de propagation (Droite)
Pourquoi ?
De tels types de faisceau présentent des propriétés intéressantes, ils permettent par exemple de mettre en rotation une molécule chimique ou bien encore de réaliser des mesures dites STED, permettant de mesurer des objets avec des résolutions dépassant la limite de diffraction.
La plateforme LaseriX est productrice de faisceau et par conséquent les fournis à des utilisateurs pour leur propres expériences, nous n’utilisons donc pas directement le faisceau pour des expériences.
Néanmoins comme son nom l’indique la plateforme est capable de produire du rayonnement XUV, notamment par le biais de la génération d’harmoniques d’ordre élevé. Or ce processus utilise un faisceau gaussien autour de 810/815nm, nous pouvons donc imaginer (et cela a été déjà réalisé auparavant) une génération d’harmonique par ce genre de faisceau. Nos derniers travaux nous ont permis d’effectuer cette génération au cours de laquelle le vortex est conservé mais dont l’ordre azimutal est multiplié par l’ordre harmonique considéré.
Ainsi l’ordre harmonique 25 (~32.6nm) porte, dans notre cas, un moment orbital l=25. Un tel ordre ne permet plus vraiment l’utilisation du faisceau pour de la mise en rotation de molécule (Trop grand), en revanche la conversion de ce faisceau vortex vers des longueurs d’onde plus courtes nous laisse imaginer des mesures STED à la résolution encore plus importante.
Mais encore ?
Pour le moment nous étudions encore les caractéristiques de ce faisceau harmonique vortex, qui a déjà fait l’objet d’une publication par notre équipe (https://www.osapublishing.org/ol/abstract.cfm?uri=ol-43-12-2780), et ce afin de l’améliorer ? Nous espérons l’injecter prochainement dans le milieu plasma amplificateur utilisé pour notre génération de laser X afin d’obtenir un faisceau vortex XUV de haute fluence.